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jeudi 17 novembre 2011

L'AME ARMENIENNE

 
L’AME ARMENIENNE
 
Ne me demandez pas ce qu’est, où est,
D’où vient l’âme arménienne.
Comme le soleil est au feu
Comme le vert est aux champs
Ah, juste comme cela, elle est partout
L’âme arménienne.
De nos vents, de nos montagnes
Du ruisseau dans nos champs,
Elle est le cri
L’âme arménienne
Du vent de nos champs, elle est la mélodie,
Nos sources sonores, comme des psaumes et des cantiques.
Des lucarnes l’encensoir, et des braseros brûlants,
D’une prière ardente, et comme l’encens vers le ciel,
Elle est la fumée bleue
L’âme arménienne
Ne demandez pas d’où elle vient, ni par quel chemin,
Venue de ce robuste Haïk, le carquois à l’épaule,
Digne beauté,
Elle est venue de l’éclair de l’épée de David,
De nos ancêtres païens,
Des feux flambants des sacrifices, elle est venue à nous,
L’âme arménienne.
Elle est venue du front de nos champs de bataille,
Multitude de javelots, flèches et boucliers blindés de fer,
Hommes casqués et chevaux, assauts, sang.
De ces chemins de sang et de larmes elle est venue,
L’âme arménienne.
Elle est venue de notre histoire victorieuse d’Avaraïr,
Des mille et une coupoles de la joyeuse Ani,
Et des tintements de nos mille cloches,
De l’abondance répandue sur nos terres,
Telle les semences, elle est le cœur vivant
L’âme arménienne
Elle vient à nous par le chemin pierreux des monastères,
Par le chemin fréquenté église-collège.
Par le triste chemin des os de nos pères, par le cimetière.
Elle descend avec le soleil, sur nos champs, sur nos cœurs,
Et à l’Ararat majestueux, inaccessible, elle vient par un chemin secret
L’âme arménienne.
L’âme arménienne est le cri d’amour des jeunes filles et des jeunes gens
Couronne royale, cordon multicolore des mariages.
C’est le chant heureux, tambour et cymbales, sourire d’argent,
Danse des jeunes filles avec douceur.
Des mères arméniennes bonnes et compatissantes, c’est des flacons pleins d’huile sainte
De leurs yeux que s’écoule
L’âme arménienne.
C’est la littérature séculaire de nos aïeux et l’ancienne langue.
De la neige de l’hiver, de la cellule du monastère de Nareg elle est la lumière ;
Recueil de chants d’une écriture vieille, vieille sur parchemin,
Et de Mesrop la tombe et le rêve,
Elle est l’alphabet,
L’âme arménienne.
Elle est notre langue au parfum d’Orient, à la fois corps et âme ;
Elle se partage comme une hostie, une communion et un petit pain.
Elle se partage comme le corps, comme le vin,
Vin et pain de messe,
L’âme arménienne.
C’est cette âme qui émigre, qui se met en route,
Quittant notre ciel et notre terre, et qui trouve
Quelque part un Arménien avec qui discuter.
Il sourit, il s’attriste, et verse des larmes avec lui.
Et il veille à ce qu’aucun Arménien ne se détourne du chemin lumineux,
Ce chemin lumineux de notre âme, qui nous emmène
Vers notre terre et notre ciel.
L’âme arménienne.
Quoi que vous disiez, c’est encore peu,
Qu’est-ce vraiment que l’âme arménienne ? Si vous regardez dans votre coeur
Vous verrez une vieille armée casquée,
Vous trouverez la sagesse et la lumière de nos monastères.
Dans votre cœur vous trouverez,
Cachée dans vos montagnes et vos rochers,
Cachée comme un écho,
L’âme arménienne.
 

                                                                   Traduction Louise Kiffer 
 
 
 
 
                                                        Hamastegh (1895-1966)